1) Révéler la mécanique de la prédation, l’isolement et l’emprise

En mai 2024, Isild Le Besco porte plainte pour viol sur mineure de plus de 15 ans contre Benoît Jacquot, pour qui elle a joué dans cinq films. Poursuivant la réflexion menée dans son ouvrage Dire vrai, paru aux éditions Denoël en mai 2024, la cinéaste revient ici sur son enfance, son métier en tant qu’actrice et sa vie de famille.

Décrivant sa relation avec le réalisateur marquée par des déséquilibres d’âge, de statut et de pouvoir, elle met en lumière le mécanisme par lesquels plusieurs hommes ont réussi à la chosifier. Son témoignage illustre précisément ce que la psychologue sociale Andreea Gruev-Vintila appelle « contrôle coercitif » : un schéma de comportement par lequel des hommes obtiennent le monopole sur les ressources disponibles dans la relation ou chez la femme, par une série d’actes qui finissent par épuiser, emprisonner, dégrader et chosifier la victime.

Leur conversation dévoile non seulement ce que la violence conjugale fait aux victimes, mais aussi ce qu’elle leur retire : liberté de penser et d’agir, auto-détermination, ressources, estime de soi… Elle devient ainsi un phare d’espoir pour les personnes prises dans cet étau invisible.

Le « contrôle coercitif » est inscrit légalement dans plusieurs pays : Angleterre, Ecosse, Belgique, Canada. Cette approche plus globale de la violence conjugale comme atteinte aux droits humains éclaire le schéma de comportement des agresseurs et les conséquences durables et dévastatrices sur les victimes, disproportionnellement des femmes, singulièrement des mères et indissociablement des enfants.

Depuis le 28 janvier 2025, le « contrôle coercitif » est entré dans le droit français. La définition retenue par l’Assemblée nationale devrait évoluer au fil de la navette parlementaire.

2) Protéger nos enfants

Dans ce deuxième volet, Isild Le Besco, Andreea Gruev-Vintila et Léonor Graser approfondissent l’analyse : pourquoi les femmes et les mères sont-elles davantage touchées par le phénomène ? Quels sont les impacts sur les enfants ? Et comment la justice, les forces de l’ordre et la protection de l’enfance réceptionnent-ils ce type de violences ?

Cette plateforme novatrice – controlecoercitif.ca – propose des contenus vulgarisés et personnalisés, selon les publics. Face au défi de faire comprendre un terme nouveau et méconnu, le Regroupement a choisi de proposer plusieurs façons de l’explorer.  

La visite commence par une expérience interactive qui met en scène des récits de femmes – écrits et audio – inspirés de faits vécus. Le site web propose de plonger dans le coeur du contenu via une bibliothèque, dans laquelle il est possible de trier les articles et les outils grâce à des filtres, ou via trois parcours guidés – Comprendre, Repérer, Agir – qui suggèrent un fil de lectures. D’autres utilisatrices ou utilisateurs pourront choisir de passer par la foire aux questions pour s’initier à la notion de contrôle coercitif.  

Pendant plusieurs mois, Stéphanie Grosjean et Eva Seker, journalistes indépendantes, ont enquêté sur la prise en charge des victimes de violences conjugales, en Belgique francophone. L’enquête se construit autour du récit de Sasha, Victoria, Isabelle et Sandrine qui en sont/ont été victimes (noms d’emprunts). Leur parcours met en lumière les mécanismes des relations affectives violentes, et la manière dont un cycle infernal s’installe au sein du couple, et par ricochet, au sein de la vie de famille.
Ces quatre histoires intimes illustrent et questionnent le fonctionnement des différents lieux de prise en charge des victimes : services de police, ligne d’écoute, associations de victimes, maison d’accueil, tribunal pénal et tribunal de la famille… L’enquête cherche à comprendre comment notre système protège les victimes et leurs enfants, empêche la récidive, responsabilise les auteurs. Sachant que depuis 2023, la Belgique est le premier pays européen à adopter une loi-cadre Stop féminicide. Avec quel impact ?
Cette investigation racontée à deux voix veut sortir des préjugés sur les violences conjugales, informer sur ces situations complexes encore taboues. L’objectif est aussi de répondre de manière constructive à la question : quelles solutions pour une prise en charge toujours fonctionnelle ?

Episode 1 : Le contrôle coercitif

Episode 2 : Vers qui se tourner ?

Episode 3 : Que fait la justice ?

Episode 4 : Comment protéger les enfants ?

Episode 5 : Que faire des hommes violents ?

Episode 6 : Réapprendre à vivre

Summary:
The Coercive Control of Children extends Evan Stark’s path-breaking analysis of interpersonal violence to children, showing that coercive control is the most important cause and context of child abuse and child homicide outside a war zone, as well as of the sexual abuse, denigration, exploitation, isolation and subordination of children. The book provides a working model of the coercive control of children and illustrates its dynamics and consequences withdramatic cases drawn from the headlines and Dr. Stark’s forensic practice. The cases include those in which the coercive control of children runs in tandem with the coercive control of women, where children are « weaponized » in the coercive control of their mother and cases where abused mothers harm theirchildren to survive or protect them from worse. By highlighting a criminal cause of child maltreatment and a plausible justice response, Evan Stark challenges the common assumptions that child abuse and neglect fall on a continuum of problems rooted in maternal deficits, immaturity, poverty, and environmental stressors as well as the combination of Child Welfare and Child Protection Services that currently provide the ameliorative response.

Summary:
Coercive control is a severe form of domestic violence experienced by millions of children worldwide. It involves a perpetrator using a range of tactics to intimidate, humiliate, degrade, exploit, isolate and control a partner or family member. Some coercive control perpetrators use violence, others do not.Drawing on interviews with children and mothers who have experienced coercive control-based domestic violence, this groundbreaking book sheds light on the impacts of coercive control on children, how it is perpetrators who must be held accountable for those impacts, and how resistance by children and mothers occurs. Resistance happens in everyday life, not just in response to incidents of violence. Breaking free from coercive control is not a one-off event but a sustained battle for safety and recovery in which child and adult survivors need supports and professional interventions that work.Written accessibly for students, researchers, practitioners, survivors of domestic violence, and anyone with a general interest in the topic, the book provides a child-centered perspective to revolutionize our understanding of how children are affected by coercive control-based domestic violence.

Dr Jane Monckton-Smith outlines an important framework to identify coercive control within relationships. Dr Jane Monckton-Smith is Professor of Public Protection at the University of Gloucestershire with a specialism in homicide, coercive control and stalking. In addition to her academic work she maintains a diverse portfolio of professional and case work. She works with families bereaved through homicide helping them with criminal justice and other processes; she advises homicide review panels, as well as chairing statutory domestic homicide reviews; she advises police on current and cold investigations, and crisis risk assessments; she trains police and other professionals in assessing threat and risk in cases of domestic violence, and recognising and identifying suspicious deaths. Her most recent book In Control: dangerous relationships and how they end in murder explains her work in creating the ”Homicide Timeline’ that shows how and why homicide risk may be escalating in cases of coercive control and stalking. This talk was given at a TEDx event using the TED conference format but independently organized by a local community.

Résumé:
Ce premier livre français sur le contrôle coercitif présente le concept qui pourrait révolutionner la vision de la violence conjugale et sa traduction juridique en France. Le contrôle coercitif, concept central d’une approche globale de la violence conjugale et intrafamiliale comme atteinte aux droits humains, désigne un répertoire de comportements oppressifs basés sur le privilège donné par le sexe. Il en est considéré dans plusieurs pays comme une meilleure définition juridique. Il révèle la violence conjugale comme forme de la violence sociale, loin de sa représentation courante comme forme houleuse de conflit conjugal/parental. Si toutes les formes de violence impliquent le pouvoir de contraindre autrui, comment les agresseurs familiaux attaquent-ils, avant et après la séparation, les droits, la liberté, la santé des victimes, en majorité femmes et enfants ? Pourquoi les effets du contrôle coercitif sont-ils durablement dévastateurs ? Comment appréhender ce précurseur majeur de la quasi-totalité des féminicides qui est aussi le contexte prévalent des violences envers les enfants ? Ce livre a un triple objectif : fournir les connaissances académiquement rigoureuses et socialement pertinentes pour décrypter ces comportements avant que les agresseurs n’utilisent la coercition et la violence pour contrôler les personnes victimes ; permettre la création d’une culture commune favorable au dialogue interdisciplinaire, interprofessionnel et sociétal pour mieux assurer la sécurité des personnes victimes et réduire l’impunité des agresseurs ; expliquer aux professionnels et aux personnes concernés les éléments-clés de cette approche, fondée par des données probantes issues de la recherche scientifique et prometteuse face aux difficultés de la justice pénale, civile, et de la protection de l’enfance, pour transformer les pratiques et les représentations de la violence intrafamiliale et pour garantir les droits humains des femmes et des enfants y compris dans les familles.

À propos de l’auteure:
Andreea Gruev-Vintila, maîtresse de conférences HDR en psychologie sociale à l’Université Paris-Nanterre, elle mène des recherches interdisciplinaires sur les processus psychosociaux, l’impact et la pénalisation des violences et du contrôle coercitif dans les sociétés contemporaines. Ses recherches ont conduit à l’introduction de formations sur te contrôle coercitif à l’Ecole Nationale de la Magistrature et à envisager l’incrimination du contrôle coercitif en France.

La chercheuse en psychologie sociale, Dr Andreea Gruev-Vintila et autrice de l’ouvrage « Le contrôle coercitif : au coeur de la violence conjugale » (2023) nous explique comment cette notion, de plus en plus utilisée par les juges, permet de comprendre de façon systémique les violences conjugales.

Pour aller plus loin :