Autorisée exceptionnellement à filmer des procès pour violences intrafamiliales, la réalisatrice Karine Dusfour dévoile les mécanismes du contrôle coercitif, stratégie systémique destinée à assujettir l’autre, dont les victimes sont très majoritairement des femmes.
Immersion inédite au cœur des violences conjugales, ce documentaire expose la fabrique de la violence psychologique à travers le concept de contrôle coercitif. Grâce à une autorisation exceptionnelle de filmer les audiences des nouveaux pôles statuant sur les violences intrafamiliales à Poitiers, Colmar et Paris, Karine Dusfour (Adeptes, de l’emprise à la déprise) dévoile ainsi les premiers procès en France dans lequel cette notion a été invoquée. Son documentaire met en scène la parole des auteurs face aux mots de la loi et de la justice, portés par des magistrats et magistrates spécialisés. Du harcèlement téléphonique jusqu’aux portes du féminicide, le contrôle coercitif est l’ensemble des microsurveillances que met en place un auteur pour tenir en captivité sa compagne. Une véritable terreur intime, à laquelle sont soumis plus de 270 000 femmes et enfants en France.
Le poids des mots
Jalousie obsessionnelle, isolement, dénigrement, insultes, géolocalisation, cyberharcèlement, privation de ressources, chantage au suicide, manipulation des enfants ou menaces de représailles à leur encontre, menaces de mort… Le contrôle coercitif est un élément central dans la compréhension des violences conjugales. Il permet de comprendre pourquoi il est si difficile pour les victimes de quitter le conjoint malfaisant (un homme dans 86 % des cas, estime-t-on). Comment ceux qui l’exercent expliquent-ils leur violence, quels mots mettent-ils dessus ? Face à eux, des magistrates spécialisées, dont Gwenola Joly-Coz, alors première présidente de la cour d’appel de Poitiers, et Ombeline Mahuzier, présidente du tribunal judiciaire de Colmar, les confrontent à la gravité de leurs actes. Aujourd’hui, souligne Gwenola Joly-Coz, les femmes représentent 70 % de la magistrature française et cela peut changer la donne en matière de violence conjugale. Celle qui a été pionnière en la matière rappelle aussi que l’obéissance de l’épouse envers l’époux fut longtemps exigée par un code civil édicté par des hommes.
Je me suis rendu en Angleterre, en Italie et en Suisse pour documenter le féminicide en Europe. Partout, les mêmes mécaniques se retrouvent, les mêmes schémas. Partout, les femmes ne sont pas assez protégées. Le féminicide n’est pas un fait divers, c’est un problème de société. Mélanie, Nunzia et Holly n’avaient pas grand chose en commun, et pourtant, elles ont toutes vécu la même histoire.
En Suisse, toutes les deux semaines, une femme meurt sous les coups de son partenaire.
Le documentaire Temps Présent (RTS) met en lumière des témoignages de survivantes (dont un enfant devenu adulte) et d’un auteur.
🔴 Ces cas extrêmes révèlent:
- La violence physique spectaculaire n’est que la partie visible de l’iceberg.
- Derrière, se cache aussi le contrôle coercitif : isolement, menaces, manipulation, pressions économiques… des violences invisibles mais tout aussi destructrices.
- La protection des victimes reste dramatiquement insuffisante : souvent, la police n’agit qu’après un drame. Et même quand des mesures existent, elles sont « passives » et peu respectées par les auteur(e)s. Les victimes se retrouvent seules, face à leur peur, leur détresse et la lourdeur des procédures judiciaires.
➡️ À voir ici : https://www.rts.ch/emissions/temps-present/2025/video/violence-domestique-comment-survivre-a-l-enfer-28988938.html
https://www.rts.ch/audio-podcast/2025/audio/pourquoi-toujours-autant-de-feminicides-28986583.html
La Suisse a enregistré 23 féminicides depuis janvier 2025, dépassant déjà les chiffres des années précédentes. Le Point J décrypte ce phénomène avec Mathilde Boyer, avocate stagiaire et doctorante à l’Université de Lausanne, spécialiste des violences conjugales.
“Il n’y a pas assez de mesures qui sont prises au niveau suisse, de manière globale et tenant compte de tous les acteurs du terrain pour vraiment mettre en place un suivi des violences dès les premiers signes”, explique Mathilde Boyer. L’absence de statistiques officielles sur les féminicides en Suisse complique la lutte contre ces crimes.
Contrairement à l’Espagne, pionnière dans ce domaine, la Suisse n’a pas mis en place de surveillance électronique active des auteurs de violences. “En Espagne, depuis la mise en place du bracelet électronique actif, il n’y a pas eu de victimes qui bénéficiaient de cette mesure qui ont été victimes de féminicides”, souligne l’experte.
En Suisse, c’est à la victime de prendre l’initiative pour demander de l’aide, qu’il s’agisse de la mise en place d’un bracelet électronique ou de l’expulsion du conjoint du logement commun. Une démarche qui peut être intimidanteMathilde Boyer, avocate-stagiaire et doctorante à l’Université de Lausanne, où elle écrit une thèse sur la façon dont le droit pénal traite les violences conjugales.
Le budget alloué par la Confédération à la lutte contre les féminicides semble insuffisant face à l’ampleur du problème. “De nombreux domaines auraient besoin de plus de budget, que ce soit la prévention, la détection ou les foyers d’accueil”, détaille Mathilde Boyer.
Néanmoins, les choses évoluent aussi. En juin dernier, face au nombre élevé de féminicides, la Confédération, les cantons et les communes ont défini trois mesures urgentes: augmenter le nombre de places dans les foyers d’accueil, analyser systématiquement chaque féminicide, et renforcer la prévention de la violence lors des phases de séparation.
Comment mieux prendre en charge les femmes lors des séparations, période particulièrement à risque? Comment fonctionne la surveillance active? Qu’est-ce que le contrôle coercitif?
D’autres Point J à écouter :
- Comment vont les garçons (série Adolescence)?, 31 mars 2025
- Comment lutter vraiment contre les féminicides?, 2 novembre 2021
- Pourquoi des hommes tuent des femmes?, 13 septembre 2022
Un poème, un déclic, un roman graphique ! Découvrez la nouvelle collection de romans graphiques d’inspiration poétique !
Ce roman graphique lève le voile sur les violences psychologiques et l’enfermement conjugal à travers l’histoire de Louise, 17 ans.
Résumé :
Louise a 17 ans. Comme sa mère, elle veut devenir danseuse. Elle souhaite quitter la maison pour suivre une formation et s’en ouvre à ses parents, Camille et Vincent. Mais Vincent s’oppose violemment à ce que Louise poursuive son rêve et accuse Camille de mettre des idées en tête à Louise. Il renvoie Camille à sa propre situation de danseuse ” ratée ” selon lui, de bonne à rien, de boulet financier. Au fil des jours, un véritable lynchage psychologique s’installe. Plus tard, Louise questionne Camille sur sa relation avec Vincent. Camille se livre finalement sur les difficultés du quotidien, sur la notion de maternité et la créativité qui puisent au même endroit, elle évoque également sa peur d’avoir fait les mauvais choix et son manque de confiance en elle. Le soir, quand Vincent rentre, Camille trouve le courage de lui faire face et cautionne le projet de Louise, elle retrouve une forme de liberté.
Histoire inspirée du poème La Panthère de Rainer Maria Rilke
Grande Échappée a été sélectionné pour le prix de la BD de France Bleu en association avec Actua BD
Grande Échappée a remporté le prix Artemisia “Poésie-Mixte” 2024
Une BD à la fois sombre et lumineuse qui décortique à la perfection les mécanismes de la violence et de l’emprise dans un couple
Cadenassée dans une relation plus que toxique avec Jonathan, son compagnon, Camille n’est plus que l’ombre d’elle-même. Elle est pourtant très entourée, mais la pression exercée par Jonathan, un savant mélange de perversion, de manipulation, de violence et d’emprise, la paralyse. Peu à peu son entourage s’inquiète et tente de la soustraire à ses chaînes invisibles. Le seuil, c’est la limite de sa tolérance : jusqu’à quand Camille va-t-elle supporter ces agressions ? C’est aussi ce lieu indéfini entre deux zones qu’il suffit de franchir pour faire basculer les choses. Au seuil d’un nouveau départ, Camille saura-t-elle saisir les mains tendues ?
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/serie-des-hommes-violents
Immersion avec douze hommes condamnés pour violences conjugales et contraints par la justice de participer à un groupe de parole pendant six mois. Déni, témoignages, paroles de victimes. Un podcast documentaire en 6 épisodes de Mathieu Palain.
épisode 1: victime et coupable
épisode 2: moi, violent?
épisode 3: Franck et sa femme
épisode 4: Kader et sa violence
épisode 5: Louise rencontre son agresseur
épisode 6: Pierre, un peu de lumière
À propos de la série
Immersion avec douze hommes condamnés pour violences conjugales et contraints par la justice de participer à un groupe de parole pendant six mois. Déni, témoignages, paroles de victimes. Un podcast documentaire en 6 épisodes de Mathieu Palain.
Après deux mois de concertation et d’ateliers, le Grenelle des violences conjugales s’achèvera le 25 novembre, date de la Journée Internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. En 2018, 121 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint.
Dès le 21 novembre, France Culture met en ligne le nouveau podcast original en 6 épisodes Des hommes violents de Mathieu Palain, réalisé par Cécile Laffon. Un podcast proposé par l’émission Les Pieds sur terre, de Sonia Kronlund.
Condamnés par le tribunal pour violences conjugales, douze hommes sont contraints par la justice de participer à un groupe de parole pendant six mois. Tous viennent d’univers différents : l’un est un homme d’affaires à succès, un autre à la recherche d’emploi, un autre tient un garage… Ils commencent par clamer unanimement leur innocence ou par refuser de reconnaître leurs torts. Puis évoluent, ou pas. Ce podcast s’attache séance après séance à suivre leur avancée, à partir à leur rencontre, à les écouter. Il est nourri des propres interrogations du narrateur, Mathieu Palain, sur le mouvement #metoo et la question des masculinités aujourd’hui. Et mis en perspective par trois récits de victimes.
avec : Béatrice Asensio, Laurence Zobel, Christine Robert, Stéphanie Cava, Cécile, Louise, Elisabeth Fabry, Sandrine Bouchet, Hélène de Ponsay, Mona Zeghmar, Ludovic, Franck, Azzedine, Kader, Morcine, Pierre, et tous les hommes rencontrés au Spip de Lyon, Jean-Luc, Ahmed, Cédric, Mustafa, Baia…
merci à : Eymeric Sudreau, Justine Doublait, Adèle Hybre, Liliane Daligand, Pascale Fournand, Mélissa Plaza, Olivier Minot, Victoire Tuaillon, Charlotte Bienaimé, Adila Bennedjaï-Zou, Sophie Guignard
Symposium suisse sur la violence domestique – Neuchâtel, 17 juin 2025
symposium bilingue (K)ein Fall wie jeder andere / Aucun cas comme les autres, consacré à la violence dans la relation parentale lors de séparations et de divorces.
👩⚖️👨👩👧 Les présentations ont abordé :
- la prise en compte de la violence dans les procédures familiales,
- l’impact de la digitalisation de la justice,
- la question de l’aliénation parentale,
- le soutien aux enfants et aux parents concernés.
📄 Les supports des présentations sont désormais disponibles en français et en allemand sur : https://www.hslu.ch/de-ch/soziale-arbeit/agenda/veranstaltungen/2025/06/17/schweizer-symposium-haeusliche-gewalt/?sourceurl=/symposiumhg
Résumé
La violence dans le couple a longtemps été considérée comme une affaire ne concernant que les seuls adultes. Des études internationales ont cependant prouvé qu’elle avait également de graves conséquences sur le développement physique et psychologique de l’enfant témoin.
Les agressions physiques, sexuelles, verbales, psychologiques et économiques, créent un climat de vie marqué au quotidien par l’insécurité et l’instabilité. Au coeur d’enjeux familiaux, sociaux et judiciaires, l’enfant se trouve, dès son plus jeune âge, menacé dans son développement.
Les implications psychologiques et médicales de la violence conjugale posent la question de la protection de l’enfant : faut-il parler d’une forme de maltraitance ?Quelles sont les réponses en France au plan social, judiciaire, thérapeutique et politique ? Comment le problème est-il abordé par les autres pays européens ?
Conçu pour les professionnels de la santé, de la justice, de l’éducation, du secteur social et médico-social, cet ouvrage fait le point sur les connaissances actuelles et définit des axes de réflexion pour améliorer notre réponse aux besoins de ces enfants.
En finir avec les féminicides – État des lieux, prises en charge et interventions
Résumé
En France, malgré l’amélioration de l’arsenal législatif, le nombre de femmes tuées, menacées d’être tuées, qui se suicident ou essayent de se suicider ne baisse pas. Il s’agit d’un constat effrayant. Le féminicide ne concerne pas seulement deux personnes, victime et agresseur, mais a aussi des effets dévastateurs sur les enfants et les proches de la victime. Pour prévenir les féminicides, il est urgent qu’une modification des représentations concernant la gravité des violences faites aux femmes et des conséquences sur leurs enfants ait lieu. Par leur expertise de terrain, les contributeurs de cet ouvrage travaillent ainsi à la transformation des pratiques pour qu’elles deviennent protectrices.
Karen Sadlier
Docteure en psychologie clinique et psychopathologie, spécialisée dans la prise en charge des enfants, adolescents et adultes victimes de violences.
Ernestine Ronai
Responsable de l’Observatoire départemental de Seine-Saint-Denis des violences envers les femmes. Co-fondatrice et co-coordonnatrice du Diplôme universitaire « violences faites aux femmes » (Université Paris 8).
Avec la collaboration de :
Yadira Cortes Castillo : coordinatrice de l’association Red Mesa de Mujeres de Ciudad Juarez au Mexique.
Christian Chevau : formateur au Centre national de formation de la gendarmerie nationale jusqu’en 2024.
Édouard Durand : magistrat, président du tribunal pour enfants de Pontoise, Co-fondateur et co-coordonnateur du DU « violences faites aux femmes » (Université Paris 8). Co-président de la Commission indépendante inceste et violences sexuelles faites aux enfants de 2021 à 2024.
Mathilde Delespine : sage-femme, coordinatrice de la maison des femmes de Rennes.
Clémentine Rappaport : pédopsychiatre, cheffe de service du service de pédopsychiatrie de l’hôpital Ballanger.
Patrick Poirret : magistrat, avocat général à la Cour de Cassation.